Laure
Maugeais

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Portfolio

Des secousses du vivant des morts des survivants du sauvage des sauvageons de la nature de l’esprit des lieux de la poésie du rêve de la clairvoyance du mensonge du vrai de la dépendance de la liberté de l’impermanence des choses de la patience, beaucoup.

D’abord il y a cette cabane de moyenne montagne, sur les rives de la Mer de Glace, un lieu chaleureux dans un environnement hostile. Chaleureux de par le cocon qu’il offre et l’accueil qu’on y reçoit, mais hostile dans cet environnement sauvage où le climat, parfois rude, façonne le paysage autant que la personnalité des gens qui y vivent ou qui le traversent.

Et puis il y a les services d’addictologie, de soins de suite et de réadaptation, l’unité Alzheimer et des résidents préparant une prochaine « ascension de vie ». 

L’hôpital est un monde que l’on peut penser radicalement différent, mais qui, à la réflexion, présente de nombreux traits communs avec celui de la montagne.

Ainsi peut-on se poser la question : qu’est-ce qui se passe au refuge ? Refuge de montagne ou refuge mental, besoin physique ou besoin intime de trouver un abri, un cocon voire une planque ? Ce qui est certain, c’est qu’il n’est qu’une étape, un espace temps pour se déposer, soi, avant de poursuivre sa route et placer ses cairns, ses repères. 

L’artiste pose ses pas dans une démarche poétique des lieux, elle entre délicatement dans le monde végétal, minéral, montagnard vécu comme sauvage, cruel même, où l’homme pose ses pas, choisit sa voie. Elle explore la forêt, les roches, dort en montagne, fait des portages, elle expérimente les montées, les descentes, dans la neige, la glace, au printemps, les nuits, les jours au refuge accompagnée ou non du gardien. C’est physiquement qu’elle aborde le projet, en le vivant de façon totale, en entrant dans l’Esprit des lieux et en pratiquant l’ethnobotanique & l’herboristerie. Parallèlement, elle écoute et accompagne les patients dans un processus thérapeutique afin d’ouvrir la porte du refuge, le quitter avec douceur, ou, de l’habiter de façon totale. En recontactant des mémoires perdues, en faisant compagnonnage avec l’esprit de la flore, les humains se (re)mettent en lien avec eux mêmes, entre eux et avec le monde dans lequel ils vivent. Ils peuvent alors remettre du mouvement dans cette mythologie des hauteurs, psychiques et géographiques. Reprendre pied au présent. Ressentir cette mémoire des interstices: la sensation d’Amour. 

Pour ce projet, l’artiste a inventé un dispositif technique inspiré de l’approche Snoezelen. Cette installation offre une posture d’écoute permettant de créer un lien individualisé dans une ambiance contenante de sécurité sensorielle et psychologique. Le mode opératoire de la création présentée est tout à fait singulière. elle a été faite en allers-retours: l’artiste a apporté son travail et ses pistes à l’hopital, les patients ont nourri ces recherches, ensemble ils ont créé une oeuvre.

Une trajectoire collective.

D’un documentaire horizontal nait une histoire presque surréaliste, mais inscrite dans le sensible: la “mythologie des hauteurs”.

Ce projet a été soutenu par la DRAC Rhone Alpes, le Département Haute Savoie, les Hopitaux du Mont Blanc, l’ARS, la communauté de communes de Chamonix Mont Blanc, la structure d’éducation du regard Image Temps.

Les coulisses sont visitables ICI.

 

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Motherhood

« Motherhood est un giron, contenant le corps d’un enfant, des végétaux, des étendues liquides, et des bouquets de pages blanches. On y entre en faisant silence, sur la pointe des pieds, les yeux grand ouverts. Voici un espace de délicatesse que baigne, pourquoi ne pas risquer l’expression, un flux d’amour envers ce qui est, fragile, précaire et pourtant immortel. L’instant photographique est moins une saisie qu’une empreinte sur l’envol de la feuille du vivant qui passe, à la fois fugace et définitif. Motherhood invite à l’attention, c’est sans nul doute un livre bouddhiste connaissant la valeur du satori. De la poudre de perlimpinpin des nuages naissent des paysages, des forêts de feuillus, des énigmes vertes et noires. Une petite fille a les paupières closes, elle connaît le début et la fin de l’histoire, son pays se nomme le Jadis. Tout apparaît pour elle dans une forme de surprésence, parce que tout est inactuel, atemporel, vibrant en sa loi propre. Il y a ici du conte, de la peur du loup, et des filaments de lumière comme des cailloux sur le chemin. La pénombre préserve, c’est celle des parents se rencontrant sous les draps à la tombée de la nuit, parce qu’en eux bat un désir de floraison, d’union, de création. Maintenant la petite fille, bloc de volonté, inamovible en ses trébuchements mêmes, pose les pieds sur la plage, dans la tourbe, alors que Saturne fait tourner en vain sa mélancolie. Elle danse, et dans son mouvement entraîne avec elle l’ensemble du paysage. Motherhood est une musique des sphères, un éloge du terrestre, un cadeau pour qui aura la chance d’en percevoir la part d’immémorial. »

Fabien Ribéry, critique d’Art et écrivain

Prix National HIP de l'Édition Photographique 2019

Catégorie Autoédition

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Présences

Les serres municipales d’Annecy vont être détruites. Que reste-t-il des gestes, de l’alchimie et de la présence du Vivant ?

Sur invitation de l’Arteppes, centre d’Art contemporain Annecy, Laure a été conviée à réaliser une oeuvre sur et à partir de ce terrain de friche. Au milieu de plaques de verre et chassis à l’abandon résistaient encore quelques sauvages et d’autres cultivées : les plantes.

De l’invisible au visible. C’est ce mouvement de vie que l’artiste évoque avec grâce et poésie. Elle vient également questionner la notion du vivre ensemble, telle une clairière humaine, voire même druidique: un clan de résistantes se dressent devant nous en déployant leur lumière.

« Il nous faut des espaces de réconciliation il nous faut la grâce des simples, il nous faut un pacte renouvelé entre les vivants et les morts. Il nous faut des gestes qui unissent, sans craindre la solitude, ni l’exil. Ainsi l’art de Laure Maugeais en son royaume bleu, inventant la beauté d’un dispositif de révélation entre ce qui a chu et ce qui persiste dans la mémoire des lieux à la façon de traces inconscientes. Ses cyanotypes sur plaques de verre rappelant par la présence tenace et fragile des végétaux celle, ténue, des hommes, sont de l’ordre d’une plongée dans l’amniotique des rêves. A la façon d’une cérémonie secrète, ils se dressent, modestes et rayonnants, telles des stèles de lumière. Le travail sur le sensible de Laure Maugeais est pudique, délicat, de grande douceur. L’artiste a photographié des mystères, des survivances, des possibilités de guérison ou de déraison. Ces belles souveraines que l’on appelle quelquefois mauvaises herbes, mauvaises langues, quand on ne sait pas remercier l’invisible, accueillent le regardeur comme s’il était lui-même fils de prince, ou clochard céleste. »

Fabien Ribery Auteur – critique d’art et écrivain

Vues de l’installation à Larteppes, Espace Art Contemporain Annecy